Pourquoi penser le postcapitalisme par modules?

J’ai souligné dans un précédent billet vouloir sortir de l’approche de recherche par modèle en économie politique postcapitaliste étant données ses nombreuses limites. Mon but est d’essayer de fonctionner désormais par modules. Ce billet vise à clarifier cette approche modulaire.[i]

Comment définir un module et comment établir en quoi il est différent des modèles développés jusqu’à maintenant? Si les modèles sont extensifs et cohérents, nous pouvons prendre l’opposé de ces qualificatifs et les attribuer aux modules : ils sont partiels et détachés. Mais partiels par rapport à quoi? Détachés de quoi?

Un module n’est pas la représentation d’une société complète, comme le modèle tend à vouloir être, mais un ensemble d’institutions qui remplissent un certain nombre de fonctions sociales déterminées. Bref, une société est composée d’une série de modules eux-mêmes composés d’institutions qui remplissent certaines fonctions.

Clarification de vocabulaire

Pour comprendre ces différents niveaux, j’utiliserai des cadres d’analyse bien connus en sciences sociales (ceux de Niklas Luhmann, de Pierre Bourdieu, de l’institutionnalisme et de Cornelius Castoriadis) pour servir de points de repère. Il ne s’agit pas d’adhérer ou de critiquer ces cadres, mais simplement de les utiliser pour faire une comparaison qui permette de comprendre ma proposition. Définissons chaque élément du plus grand au plus petit.

Société / Modèle

J’utilise le terme « société » dans le même sens que Luhmann, Castoriadis ou Bourdieu l’utilisent. Pas que ces auteurs aient une même définition du fonctionnement de la société, loin de là, mais ils désignent le même niveau social quand ils en parlent. C’est l’ensemble social le plus grand, le niveau macro à partir duquel penser les ensembles humains. Dans le monde qui nous est contemporain, plusieurs sociétés correspondent aux frontières des États-nations auquel elles sont liées. Ce n’est pas, bien sûr, une correspondance parfaite pour plusieurs sociétés (le Québec et le Kurdistan viennent en tête comme exemples très différents de sociétés qui ne correspondent pas aux frontières d’un État-nation), mais ces précisions ne changent pas le niveau d’analyse. C’est l’unité sociale la plus grande qui se reconnaît elle-même comme unité.

Faire ce choix analytique sous-entend qu’il n’y pas de « société mondiale » ou de « société des nations » pour reprendre un terme suranné. On postule que les sociétés peuvent interagir entre elles, qu’on peut analyser ces interactions, mais que cet ensemble de relations ne forme pas une société. Le niveau international est un espace d’interaction entre sociétés, mais il n’a pas l’unité et la densité institutionnelle, légale, culturelle et sociale d’une société et se pense très rarement comme tel.

Une société est composée de plusieurs systèmes sociaux eux-mêmes composés d’institutions qui remplissent diverses fonctions. C’est au niveau de la société qu’interviennent les modèles postcapitalistes « classiques » (Devine 1988; Albert et Hahnel 1991; Cockshott et Cottrell 1993). Leurs concepteurs n’ont pas la capacité – et c’est normal, c’est une tâche impossible à réaliser théoriquement parce que beaucoup trop ambitieuse vue la complexité des sociétés – de reproduire de façon théorique la totalité sociale. Néanmoins, d’une façon formelle et abstraite qui se concentre surtout sur les institutions politico-économiques, leur objectif est de tracer les contours de ce dont pourrait avoir l’air une société postcapitaliste. Cette simplification théorique est ce que j’appelle un modèle.

Système / Module

Un système est un ensemble d’institutions sociales qui remplit une série de fonctions particulières à l’intérieur d’une société donnée. De cet ensemble d’institutions et de fonctions se dégage une certaine unité : les institutions sont coordonnées pour organiser une partie de la société qui se distingue des autres parties, par exemple un secteur spécifique. Le réseau de la santé ou l’appareil juridique pourraient être de bons exemples de systèmes. Ils contiennent des institutions (hôpitaux, cliniques, laboratoires) et remplissent des fonctions spécifiques (guérir des malades, prévenir des risques de maladies, repérer et diagnostiquer des symptômes). Ils sont liés à d’autres systèmes sociaux, mais en sont également distincts. Ils sont de petits mondes au sein de l’univers plus large qu’est la société. Ils ont du vocabulaire propre, des façons de faire uniques, des manières de souligner le mérite et le démérite, le prestige et la disgrâce qui les distinguent des autres systèmes sociaux.

Mes inspirations théoriques pour penser les systèmes sont un croisement entre le système luhmannien et le champ bourdieusien. L’approche du social de Luhmann (2011) est très analytique, mais tend à réifier les organisations sociales. Elle permet de penser des systèmes qui génèrent leurs propres codes, leur propre langage et qui ont leur système de validation interne – autopoïétique. D’un point de vue externe, ces systèmes fonctionnent comme des boîtes noires. Un intrant provient d’autres systèmes et il en sort un extrant dirigé vers d’autres systèmes encore. Par exemple, dans une société capitaliste contemporaine, le système de « justice » reçoit en intrant des accusé·e·s et des accusations provenant, par exemple, de la sécurité publique. Il en sort comme extrants des jugements, des coupables et des innocent·e·s qui sont renvoyé·e·s à d’autres systèmes : carcéral, productif, domestique, etc. L’approche analytique de Luhmann est utile pour tracer des frontières et désigner les systèmes d’un point de vue général, mais elle donne l’impression que ces systèmes sont habités par des algorithmes tentant de résoudre des problèmes en suivant des règles, mais pas par des humains.

Avec le concept de champ, Bourdieu désigne lui aussi un espace social jouissant d’une certaine autonomie et il permet de voir des rapports humains dans les systèmes. Grâce à son apport, on distingue des positions différenciées au sein du système et des dynamiques de pouvoir (Bourdieu 2014; Sapiro 2020). Les concepts de capital et d’habitus, par exemple, nous rappellent que les interactions au sein des systèmes, pendant comme après le capitalisme, sont et seront le lieu de rapports de pouvoir, de conflits et de domination. Bien que ces conflits ne seront pas les mêmes que dans le capitalisme, il faut éviter de penser les systèmes sociaux à l’extérieur de ces conflits – dans une société pacifiée et strictement fonctionnelle. Il faut plutôt poser la question de comment les systèmes postcapitalistes donneront une nouvelle forme aux conflits entre les humains (Arboleda 2021).

Le module est au système ce que le modèle est à la société. C’est la version théorisée, simplifiée et schématique des systèmes sociaux. C’est notre tentative d’analyser sur papier leur fonctionnement et de tracer les contours de ce que pourraient avoir l’air des systèmes postcapitalistes.

Le module est protéiforme et, en cela, les exemples de la santé et de la « justice » donnés plus haut peuvent être trompeurs, car ils correspondent à une approche sectorielle. Or, on peut (et on devra nécessairement) concevoir des modules qui traversent plusieurs secteurs de la société. Par exemple, l’organisation de la rémunération du travail ou celle de la reproduction sociale peuvent très bien être pensées comme des modules. Ces modules traverseront d’autres modules, ce qui fait qu’il y aura forcément des croisements intermodulaires et non une série de modules tous pleinement distincts et indépendants les uns des autres.  Ainsi, la cohérence interinstitutionnelle au sein du module est plus importante que le caractère sectoriel de celui-ci face au reste de la société. Un module existe parce que les institutions qui le composent « se parlent » et « s’organisent » pour produire un « résultat » à partir de certain de certains « matériaux » ou « intrants ». On pourrait dire que le module « fait système » et que c’est cette unité interne qui est l’élément fondamental du module.

Cette définition large laisse de l’espace pour la création de modules postcapitalistes qui ne sont pas une simple reproduction des systèmes existant dans les sociétés qui nous sont contemporaines. Plusieurs travaux récents travaillent déjà par modules (Nieto 2021; Planning for Entropy 2022; Grünberg 2023; Dapprich 2023; Dufour, Elias-Pinsonnault et Tremblay-Pepin 2023; Beaucaire, Saey-Volckrick, Tremblay-Pepin 2023; Durand Folco, Fourrier et Tremblay-Pepin 2024; Sorg 2025) et certains modèles développés dans les deux dernières décennies ont, eux aussi, une approche plus modulaire et sont moins portés vers des propositions exhaustives qui couvriraient la société en entier (Saros 2014; Laibman 2015; Campbell 2022).

Institution

Les institutions sont les formes d’organisation sociales qui composent les systèmes. L’hôpital, le salariat, le tribunal et la famille nucléaire sont des exemples d’institutions.

Ma conception des institutions est fondée sur un croisement entre les théories institutionnalistes et le concept d’institution chez Castoriadis. De l’institutionnalisme, je retiens : l’idée d’une institution comme coutume cristallisée et comme ensemble de règles, la dialectique construction/validation entre les acteurs et actrices et les institutions et les cycles de rétroaction/renforcement des règles sociales. Tout ceci est une base difficile à nier, mais si nous limitons nos modules strictement à cette compréhension des institutions, il nous manque le plus important : ce qui sort les institutions de leur caractère strictement fonctionnel.

Pour pallier ce manque, je mobilise Castoriadis de qui je reprends le caractère potentiellement émancipateur des institutions. Dans son projet d’autonomie, les institutions sont, pour Castoriadis, la façon que le démos a de se donner forme à lui-même. Il n’existe pas en fait de démos en dehors de ces institutions; ce sont elles qui le révèlent. En nous dotant d’institutions, nous devenons collectivement qui nous sommes.

Fonction

Une fonction est un des rôles qu’une institution joue au sein d’une société donnée. La notion de fonction peut, évidemment, s’agréger ou se désagréger à l’infini. On peut garder des enfants et cette fonction peut inclure de leur faire à manger. À quel niveau devrait-on, alors, parler de fonction? Quand il s’agit de nourrir des enfants ou quand il s’agit d’en prendre soin en général ? À mon avis, pour fin de classification, une fonction devrait toujours être l’action la plus générale possible qui ne modifie ni l’institution qui l’accomplit ni le public auquel elle est destinée.

 

Avantages des modules

La méthode par modèles a des avantages et des inconvénients – c’est aussi inévitablement le cas de l’approche par modules. Bien sûr, si je défends une transition des modèles aux modules, c’est que je pense que la méthode par modules est la plus avantageuse des deux à cette étape-ci du développement du champ de l’économie politique postcapitaliste.

Je l’ai mentionné dans mon précédent billet : l’approche par modèles est loin d’avoir été inutile, mais elle a, en quelque sorte, fait son travail et son temps. L’intérêt pour la recherche sur le postcapitalisme a augmenté, des chercheurs et chercheuses d’horizons divers se réunissent pour y participer, discuter et publier; nous arrivons à une nouvelle étape et nous avons désormais d’autres moyens. Je propose donc que nous nous concentrions davantage sur les modules et institutions plutôt sur les modèles eux-mêmes. Cette approche méso a, à mon avis, quatre avantages importants.

D’abord, elle permet d’éventuellement réduire les coûts d’entrée dans le champ. En effet, une personne qui s’intéresse déjà à la question du logement ou de la rémunération ou de la reproduction sociale au sein des sociétés capitalistes peut avoir un intérêt à savoir ce qui se dit sur cette question dans une perspective postcapitaliste. Si des écrits sont disponibles à propos de son domaine de recherche dans une perspective postcapitaliste par modules, la transition vers notre champ reste coûteuse (il faut changer de perspective complètement et passer de la critique à la proposition, ce qui n’est pas simple), mais elle l’est beaucoup moins que d’avoir à faire l’effort de connaître l’ensemble des modèles et de bien les comprendre pour ensuite commencer, plusieurs mois de lecture plus tard, à travailler sur la question qui intéresse. Cet avantage est cependant conditionnel à ce que ceux et celles qui connaissent déjà les modèles produisent un répertoire des différentes options par module, notamment en les extrayant des modèles existants. Il me semble qu’il y a là une tâche qu’un groupe de recherche comme le nôtre pourrait accomplir. Le rattachement de chaque module à des disciplines de recherche déjà existantes est alors plus facile. Tout le monde ne souhaite pas nécessairement développer des connaissances dans toutes les sphères sociales qui seront transformées par une transition au-delà du capitalisme. On veut parfois contribuer à cette transformation à partir de sa propre spécialité de recherche.

Ensuite, le travail par modules peut aussi servir à réduire l’arbitraire inhérent aux modèles. Quand on fait des propositions, on est forcé·e de faire des choix – c’est sain et normal. Cependant, plus on propose large, plus ces choix sont nombreux. Partons du micro vers le macro en reprenant les niveaux que nous venons de définir. Supposons une conceptrice de modèles qui suive ce chemin du particulier vers le général pour bâtir son modèle (il y a fort à parier que ce n’est pas ainsi que les modèles ont été conçus, mais peu importe – c’est une image à des fins heuristiques). Notre conceptrice s’attaque à l’épineuse question de la rémunération. Au niveau institutionnel, une des questions qu’elle devra inévitablement aborder est celle du véhicule de cette rémunération. Dans les sociétés capitalistes, cela passe par l’institution de la monnaie. Plusieurs options sont disponibles d’un point de vue postcapitaliste, pour n’en évoquer que quelques-unes :

  • Une monnaie ou pas?
  • Si oui, une monnaie qui s’accumule ou pas? Qui conserve sa valeur dans le temps ou la perd? Une monnaie qui se transfère à quelqu’un·e? Une monnaie qui disparaît avec les transactions?
  • Sinon, quel véhicule pour la valeur? Des transferts en nature? Qui s’organisent comment et avec quel niveau de centralisation?

La seule institution monétaire pourrait soulever plusieurs autres questions. En fonction de ses critères et priorités, notre conceptrice de modèle prendra des décisions et retiendra une option plutôt que l’autre. Cette institution – la monnaie – sera liée à d’autres institutions dans le module de la rémunération. Pour ces institutions, d’autres choix devront être faits. Pour assurer la cohérence de sa proposition, notre conceptrice de modèles doit veiller à la cohérence de toutes ces institutions dans son module sur la rémunération.

Son travail n’est pas pour autant terminé une fois ce module proposé, il lui faut ajouter un troisième niveau de complexité et penser la cohérence de ce module avec le reste des modules qui composent le modèle. Ce nouveau moment lui demande de nouveaux choix, qui lui font retenir et éliminer d’autres options. Je ne reproche pas à notre conceptrice imaginaire de faire ces choix – c’est le propre du travail qu’elle s’est astreinte à faire. Or, voilà, cette complexité augmente forcément le niveau d’arbitraire surtout quand un modèle associe des modules dont les fonctions sont relativement distantes les unes des autres. Pourquoi lier ce système de rémunération avec cette approche de l’investissement? Pourquoi lier ce module juridique et ce module portant sur le travail reproducteur? Pourquoi ne pas avoir fait d’autres choix?

On le voit, l’approche par modèles contraint à faire une ribambelle de choix. Chacun peut être justifié, mais leur composition spécifique est forcément arbitraire. En nous concentrant sur les modules, on peut réduire (sans jamais l’éliminer, ce qui ne serait ni possible ni souhaitable) l’arbitraire inhérent à l’approche par modèles. De plus, en fonctionnant par modules, il est possible d’éviter de choisir tout court. La réflexion postcapitaliste peut alors être présentée comme un répertoire ou un éventail d’options sur la façon dont pourrait fonctionner un module plutôt qu’un débat entre des options toutes faites.

Il est aisé de voir comment cette option de module peut être utile pour classifier et ordonner les propositions selon certains critères. On pourrait par exemple reprendre les critères que je soulevais dans un article (Tremblay-Pepin 2022) pour classer et évaluer différentes organisations modulaires sur des sujets donnés. On pourrait aussi tout simplement les ordonner en fonction de leur distance avec l’organisation actuelle de ce module au sein des sociétés capitalistes. L’approche modulaire permet donc à chacun·e de faire une évaluation des options postcapitalistes disponibles, à partir des critères qui sont les siens.

Enfin, cette adaptabilité de l’approche modulaire la rend plus à même de répondre à la question de la sortie du capitalisme, enjeu soulevé de façon répétée et pour lequel les modèles n’offrent que des réponses vagues et souvent insatisfaisantes (c’est normal, ce n’est pas leur objet). Le capitalisme prend différentes formes et a différents modes de régulation dans différentes sociétés. Ainsi, comme le soulignent J.K. Gibson-Graham (2006), certaines sociétés ont sorti certaines fonctions (voire carrément certaines institutions ou modules) des rapports strictement capitalistes. En ayant une palette de modules devant eux et elles, les militant·e·s d’une société donnée peuvent mieux évaluer sa situation et repérer les espaces où des gains sont à faire ou, à l’inverse, repérer les institutions déjà en partie au-delà du capitalisme sur lesquelles s’appuyer pour construire la suite. Une approche par modules permet de penser des stratégies adaptées aux différents contextes.

 

Inconvénients des modules

Les modules ont, bien sûr, les défauts de leurs qualités. Ils ne permettent pas d’offrir des solutions cohérentes, des propositions toutes prêtes de ce dont pourrait avoir l’air la société après le capitalisme. Ils peuvent même laisser présumer une cohérence potentielle entre différents modules alors qu’elle n’existe pas. Ils exigent des lecteurs et lectrices et des futur·e·s chercheurs et chercheuses de faire le travail de vérifier cette compatibilité potentielle.

On pourrait même aller jusqu’à poser la question : une approche par modules apporte-t-elle vraiment de la nouveauté ? N’est-ce pas déjà ce que font les anticapitalistes qui œuvrent ici et là dans les différentes sphères des sciences sociales? Possible, et si c’est le cas, réunir toutes ces contributions en un même lieu et sous une perspective postcapitaliste sera déjà intéressant en soi. Cependant, je crois que c’est bien mal connaître l’état des disciplines que de présumer de l’existence de modules postcapitalistes déjà rédigés qu’il s’agirait simplement de réunir. Mon expérience me porte plutôt à croire que les chercheurs et chercheuses qui s’engagent dans une perspective critique dans leurs disciplines sont, justement, « critiques » et ils et elles ne produisent pas souvent de propositions concrètes – encore moins de propositions ayant comme objectif une sortie du capitalisme.

Doit-on alors prendre garde que cette approche par modules ne devienne la porte d’entrée d’un réformisme compatible avec le capitalisme? En un mot : oui. Cela dit, il faut se souvenir que ce débat sera toujours présent. Le péril de la dilution du radicalisme, comme à chaque fois, vient de la popularité soudaine de notre champ de recherche. De nouvelles personnes et de nouvelles idées peuvent générer des propositions qui reproduisent le système dominant. Ce risque existe, bien sûr, mais il est inhérent au travail que nous faisons et il ne peut être réduit que par le débat et la critique.

 

Conclusion

La présente proposition vise une réinterprétation du rôle de la recherche en économie politique postcapitaliste. J’envisage notre champ de recherche plus ouvert qu’il ne l’a été, plus simple à aborder. N’exigeant pas d’être de grand·e·s intellectuel·le·s généralistes qui ont réponse à tout, mais permettant à une somme de technicien·ne·s et d’intellectuel·le·s spécifiques de pouvoir s’y joindre et de formuler leurs plus modestes contributions.

Les modèles resteront des sources d’inspiration et d’idées, mais on décollera peut-être enfin de l’impression qu’il faut choisir un camp, pour la remplacer par l’envie de faire partie d’une équipe qui travaille ensemble sur un même objet de recherche malgré des idées distinctes sur certains points. C’est de ce travail d’équipe important que je crois que notre champ de recherche a désormais besoin.

 

[i] Comme le précédent billet, celui-ci a bénéficié de la relecture de Sophie Elias Pinsonnault. Cet apport a été très important parce qu’il a permis un recadrage des définitions qui rend la proposition beaucoup plus claire et plus simple.

 

Bibliographie

Arboleda, Martín. 2021. Gobernar la utopía: sobre la planificación y el poder popular. Buenos Aires : Caja Negra.

Albert, Michael, et Robin Hahnel. 1991. The political economy of participatory economics. Princeton : Princeton University Press.

Beaucaire, Krystof, Joëlle Saey-Volckrick, et Simon Tremblay-Pepin. 2023. « Integration of approaches to social metabolism into democratic economic planning models ». Studies in Political Economy 104 (2) : 73‑92.

Bourdieu, P. 2014. Théorie du champ. Paris : Seuil.

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Dapprich, Jan Philipp. 2023. « Optimal Planning with Consumer Feedback: A Simulation of a Socialist Economy ». Review of Political Economy 35 (4) : 1136‑56.

Devine, P. J. 1988. Democracy and economic planning: the political economy of a self-governing society. Boulder : Westview Press.

Dufour, Mathieu, Sophie Elias-Pinsonnault, et Simon Tremblay-Pepin. 2025. « An International Interface: Democratic Planning in a Global Context ». Competition & Change 29 (1) : 83‑100.

Durand Folco, Jonathan, Ambre Fourrier, et Simon Tremblay-Pepin. 2024. « Redéfinir démocratiquement les besoins pour planifier l’économie ». Politique et Sociétés 43 (2).

Gibson-Graham, J.K. 2006. A postcapitaist Politics. Minneapolis : University of Minnesota Press.

Grünberg, Max. 2023. « The Planning Daemon: Future Desire and Communal Production ». Historical Materialism 31 (4) : 115-159.

Luhmann, N. 2011. Systèmes sociaux. Esquisse d’une théorie générale. Québec : Presses de l’Université Laval.

Nieto, Maxi. 2021. « Entrepreneurship and Decentralised Investment in a Planned Economy: A Critique of the Austrian Reading ». Historical Materialism 30 (1): 133‑63.

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Tremblay-Pepin, Simon. 2022. « Five Criteria to Evaluate Democratic Economic Planning Models ». Review of Radical Political Economics 54 (3) : 265‑80.

 

Dans le cadre du projet de recherche en cours :
Planification économique démocratique

Axes de recherche :
Émancipation